The Body Snatcher
Gaël Peltier
Jusqu'où peut-on emmener les images, parmi lesquelles l'image de soi, l'image que l'on a de soi et l'image que l'on donne de soi, tout en restant soi-même ? Sans déguisement ni travestissement, en faisant en sorte que l'obsession s'incarne en nous, en devenant l'idée obsédante, que demeure-t-il de nous ?
Gaël Peltier est né en 1972 ; il vit et travaille entre Paris et Saliceto (Haute-Corse).
Son travail a été suivi par le FRAC CORSE et la Collectivité Territoriale de Corse depuis maintenant plusieurs années. Dès 2005, il a été invité à participer à de grandes expositions de groupes programmées par le FRAC CORSE et certaines de ses réalisations sont venues enrichir la collection ainsi que celle du FRAC PACA.
Son œuvre exigeante et son engagement radical se sont imposés sur la scène artistique nationale. Aujourd'hui, cette première exposition personnelle est attendue.
Qu'il s'agisse de performances, de photographies, de vidéos ou d'arrangements d'objets, ses œuvres évoquent des situations et des codes comme ceux, très souvent, des films noirs du cinéma.
Ainsi, le titre même de l'exposition fait-il référence à un film réalisé en 1956 par Don Siegel, et livre déjà des indices sur la démarche de Gaël Peltier.
Invasion of the Body Snatchers est une œuvre de fiction racontant comment des cosses prennent l'apparence des corps des habitants d'une petite ville des Etats-Unis pendant leur sommeil.
Lui-même, à l'image de ces cosses, prend possession par effraction des corps de personnages fictifs ou non, afin de produire des situations s'inscrivant dans le champ du réel.
"Jusqu'où peut-on emmener les images, parmi lesquelles l'image de soi, l'image que l'on a de soi et l'image que l'on donne de soi, tout en restant soi-même ? Sans déguisement ni travestissement, en faisant en sorte que l'obsession s'incarne en nous, en devenant l'idée obsédante, que demeure-t-il de nous ? Ce sont les question auxquelles Gaël Peltier cherche à répondre lorsqu'il s'essaye à, non pas jouer ni mimer, mais être dans la peau de Robert de Niro cherchant lui-même à incarner Jake LaMotta en passant par le palier supplémentaire du sosie de l'acteur. De même qu'aujourd'hui, en se soumettant à un entraînement quasi professionnel de boxeur, l'artiste, en changeant de corps, s'essaye à remonter à la même réalité, à savoir ce que furent les sensations, le physique du modèle original, Jake LaMotta sur un ring, dans sa propre époque et sa propre sueur." Jean-Yves Jouannais(1)
Gaël Peltier peut véritablement se mettre dans une nouvelle peau, n'hésitant pas à faire subir à son corps d'importantes transformations.
À l'occasion d'une résidence à New York durant six mois, il met justement en place un programme contraignant afin de prendre près de 30 kilos.
Ce projet a donné lieu à la réalisation de performances, d'objets, de vidéos et de photos.
C'est dans ce contexte que quotidiennement Gaël Peltier a créé La Conjuration, un journal sous la forme de séquences vidéo où l'artiste endosse plusieurs rôles afin de mettre en crise son propre système de création tout en ridiculisant les règles sociales du champ de l'art.
Au cours de la projection, les traits de l'artiste s'épaississent, tandis que les propos de ces sketchs deviennent de plus en plus virulents.
Ces simulacres, incarnés par l'artiste en chair et en os génèrent des œuvres précisément élaborées qui laissent affleurer une indicible inquiétude mais aussi un humour corrosif.
Cette exposition au FRAC CORSE rend compte des travaux les plus récents réalisés par l'artiste jusqu'à aujourd'hui et notamment lors des résidences qu'il a effectuées à Istanbul et à New-York entre 2009 et 2010. Elle comprend 20 œuvres.
Elle fera l'objet d'un catalogue auquel participeront Jean-Yves Jouannais, critique, écrivain et artiste — très influent à partir des années 1990, et Frédéric Roux, artiste et écrivain.
Le jour du vernissage, Gaël Peltier a réalisé une performance "Quiconque tient une poêle à frire est maître de la mort" présentée comme un spectacle.
(1) extrait du texte "La Conjuration des cochons extraordinaires" pour le catalogue à paraître de l'exposition "The Body Snatcher » de Gaël Peltier.